samedi 9 juillet 2011

décontrastés de l'orthographe

De temps en temps, je vais au temple pour dépanner, quand le titulaire de l'orgue fait la gueule est en vacances. Ca ravit le pasteur, qui désespère de voir ma piété s'exprimer essentiellement dans ma musique, et j'en profite pour tester mes nouvelles compositions devant un public de fans. Quand j'étais jeune homme, j'invitais les filles à la tribune pour les éblouir mais aujourd'hui mon poste n'est plus qu'un grenier à vieilles chouettes, où de temps à autre rôde le chantre qui tente de prendre de la hauteur.

Donc autant dire que j'y vais décontracté. C'est pourquoi je n'avais pas prévu le coup, ce matin, à la sortie de l'office en tombant sur Zumeyer qui me guettait l'air de rien. Je m'y attendais d'autant moins qu'elle est plutôt le genre de personne à qui on évite de penser en dehors du S.T.O. (mon petit nom pour les quelques heures mensuelles que je passe à enseigner au conservatoire): toujours sur le râble des profs, à leur rappeler qui dirige la boîte. Impossible d'y couper, la cour du temple est minuscule, j'engage donc poliment la conversation, elle me félicite sur une pièce qu'elle a déchiffrée la veille et prend mon bras en me tirant vers la sortie. Méfiance.
"Dites donc, commence-t-elle, j'ai lu les copies que vous vous apprêtez à rendre à vos élèves (j'avoue, je les ai oubliées sur la table de la salle des profs après qu'une collègue m'eût distrait avec un massage des pieds): c'est bourré de fautes d'orthographe et vous les laissez toutes passer; il faudrait voir à être plus sévère!
- Ah, mais je ne suis pas professeur de français, c'est déjà bien suffisant de corriger les dictées musicales, je ne vais pas non plus me mettre à donner des cours de grammaire, on y passerait la jour...
- Ce n'est pas ce que je vous demande, me coupe-t-elle de son air pincé, mais il y des règles élémentaires à respecter, sinon ces enfants resteront bêtes et iront fournir les rangs des altistes.
- Je verrai." Je lui réponds, avant de me souvenir d'un rendez-vous important avec les copains au café Zimmerman.

Bien évidemment, ma seule décision en la matière a été de m'assurer de bien ranger à l'avenir mes copies dans le casier qui m'a été alloué. Je ne comprends pas ce qu'ont les Français avec leur système orthographique, cette relation passionnelle qui les conduit à vouer aux gémonies quiconque gratifie d'un accent circonflexe le i de pitre ou ne parvient pas à écrire correctement le nom d'un obscur compositeur sur une affiche de concert. Heureusement qu'on n'applique pas les mêmes critères à la musique: il n'y a qu'à voir les partitions contemporaines: pas deux ne s'écrivent pareil et pourtant, tout le monde les joue! Et je ne parle même pas de la confusion entre intelligence et faculté à ne pas faire de fautes; si tous les compositeurs de génie avaient dû livrer des partitions nickel pour être joués, notre patrimoine serait surtout constitué de musique militaire.

Pour rassurer Zumeyer, je lui ai dit envoyé ce nouvel outil en lui disant que c'était ma bible - surtout pour faire marrer les élèves, mais ça je l'ai gardé pour moi...C'est la fin de l'année, restons décontractés: si tout le monde parvient à jouer ensemble au concert de fin de cycle, ce sera déjà pas mal, et tant pis si certains se demandent qui est ce "Mozzar" sur la couverture du programme.

1 commentaire:

  1. Cher JSB,

    je lis régulièrement votre blog, et il me fait parfois rire, mais permettez-moi de vous dire que les vieux clichés sur les altistes sont indignes de votre plume, et je ne parle même pas de ce que vous sous-entendez sur la musique militaire, qui est à mon sens très honorable.

    Une altiste amateur et femme de militaire

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